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17 août 2016 3 17 /08 /août /2016 20:38

Livre : Dans son dernier roman, Dieudonné Zélé décrit Brazzaville comme un paradoxe de fureur de vivre et de mourir

Eglises de réveil, bars ouverts jusqu’à l’aube, veillées mortuaires, etc. Est-il encore possible de vivre dans Brazzaville et d'aspirer au calme que requiert la verticalité, la vraie? L’Appel de la Motaba (Editions France-Libris), le dernier roman de Dieudonné Zélé aborde le sujet avec une gravité et une rigueur littéraires qui caractérisent l'auteur.

Style allègre, tempo vif, l’Appel de la Motaba est une douce pluie de propositions indépendantes et /ou de subordonnées courtes, d’inversions et d’exclamations. Une friandise de catachrèses. Le roman s’ouvre sur un locus ameonus avant de basculer dans un locus terribilis. S’ensuit une longue analepse sur le Brazzaville d’autrefois. « La tête du jeune homme risquait d’exploser sous la cohorte impétueuse des images et impressions du passé. Ngondzo, l’enfant prodige, n’était plus qu’un pantin plongé dans une lessiveuse de sentiments contradictoires. C’était un immense paradoxe comme l’était la ville que le jeune homme était en train de redécouvrir… » Oui, la ville d'autrefois est devenue noire, un lieu hostile. L’histoire : Ngondzo naît et grandit à Dongou dans la Likouala. Après ses études primaires, il s’installe avec ses parents à Brazzaville, à Poto-Poto. Son nouvel environnement lui plaît bien. Puis il s’envole pour l’Europe. Dix ans après, il revient au pays, et patatras, Brazzaville a perdu de sa beauté, de son calme. Brazzaville n’est plus que champs de ruines par ses constructions anarchiques et la profusion des églises de réveil, bars et autres faiseurs de bruits. Dans ce vacarme permanent, Ngondzo ne se retrouve plus ; il est étranger chez lui. « Oui, Brazzaville la capitale de son pays était, pour lui, un gigantesque paradoxe de bruits, de fureur de vivre et de mourir, par la même occasion, de chants, de cris de joie et de cris de douleurs mêlés, de rires et de pleurs, de poussière, de saletés, de richesse et de pauvreté en même. »

Le texte prend parfois l'allure d'un Essai sociologique. L'auteur s'y incruste et donne son point de vue. Mais le narrateur est à l’image de l’auteur et inversement : entre le narrateur et l'auteur, la barrière n'est pas très définie. Dieudonné Zélé, en effet, quitte le Congo en 1966, pour n’y retourner qu’en 2013. Le Brazzaville de son enfance a disparu et a laissé place à un Brazzaville furieux, instinctif ; une ville qui alterne calme et troubles. Professeur agrégé de Lettres, Dieudonné Zélé est l’auteur de plusieurs ouvrages et donne des conférences à travers le monde.

Bedel Baouna

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