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20 novembre 2015 5 20 /11 /novembre /2015 15:19

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Livre : Huguette Nganga Massanga fait parler lit, matelas, serrure…

L’écrivain d’origine congolaise, Huguette Nganga Massanga, sera en dédicace à Paris, le vendredi 27 novembre, pour son nouveau livre "Moi aussi je parlerai dans un film" (Editions Langlois Cécile)

Dans cet océan de bricoles qu’est devenue la littérature congolaise, retentit de ses fonds abyssaux, en ce mois de novembre, une déflagration très silencieuse. "Moi aussi je parlerai dans un film" est une pièce de théâtre, bien que le mot n’y soit pas mentionné, comme par pudeur. Une pièce qui alterne, cahin caha, monologue et dialogue insipides. L’auteure, déjà connue pour plusieurs productions littéraires, membre de l’organisation du Festival international Kimoko, aborde dans cette pièce, sans vraiment descendre dans la grotte de l’inconscient et du subconscient du principal personnage, le rêve d’un orphelin de 19 ans, friand des DVD sur la Sape, d’y intervenir vaille que vaille.

La pièce, très concise, ne comporte pas d’Actes. Seulement des scènes, au nombre de sept. La scène 1 nous montre un garçon oisif, seul dans sa maison, en train de rêver. Puis on entend le chant d’un musicien, en lingala. La scène 2 nous apprend les circonstances de la mort de sa mère, de ce qu’elle a fait comme métier… La scène 3, elle, est relative à son entretien téléphonique avec un Parisien ; la scène 4 nous donne à entendre un dialogue de SOURDS entre des personnages d’une autre espèce : le lit, le matelas, la serrure, la valise, etc.

Franchement, quel intérêt tire-t-on en publiant un livre énervant, parfois à compte d’auteur ? Plaisir ou passion ? Recherche de légitimité intellectuelle ou effets de manche ? Dans les années 1920, André Gide nous mettait en garde contre les déréglementations littéraires. En 2015, cette mise en garde reste d’actualité. Sans règles, pas d’œuvre d’art. Le théâtre, entre autres règles, ce n’est pas tant le discours des personnages que les conditions d’énonciation de ce discours qui compte ; le théâtre ne tolère pas l’allure discursive, de la discontinuité des sentiments ; le théâtre, c’est l’unité de temps, d’action et de lieu. Or la pièce d’Huguette Nganga s’étale sur plusieurs années. Dans un premier temps, elle nous montre un jeune homme rêveur, puis dans un deuxième temps un homme chef d’entreprise qui a renoncé à son envie de se rendre en Europe. Il y a, page 40, un démenti catégorique de ce qu’il pensait autrefois : « Cette naïveté à vanter devant les médias les créations d’autrui, faire de la publicité gratuite m’est devenu insupportable car, moi aussi j’ai besoin de publicité maintenant. » Sacrilège ! Il eût fallu ici, et ce n’est pas un interdit, s’inspirer de La double inconstance de Marivaux – un chef d’oeuvre intemporel : d’abord présenter un jeune homme qui manifeste la fougue de parler dans un film sur la Sape, ensuite montrer un homme qui veut absolument réussir chez soi, tant les opportunités y sont nombreuses. En somme, un homme écartelé entre deux désirs. Rien de tel.

Certes le sujet est épuisé et il prête plus au roman qu’au théâtre ! Mais par l’éclair d’un jeu de miroir, l’auteure aurait du nous présenter un jeune homme qui, en regardant les DVD sur la Sape, se réapproprie son identité. La Sape ne répond-elle pas à une question à la fois existentielle et philosophique : Qui suis-je ? La Sape fait partie de l’ADN des Congolais et, loin d’être un snobisme débridé, elle est une « grâce d’exister », une « stupeur d’être ». C’est le commencement de la merveilleuse « guerre pour l’amitié que chacun se doit ».

La scène 7, qui s’apparente à la scène de dénouement, est pathétique : elle s’écarte du langage théâtral pour glisser dans le journalisme. Elle est construite à la manière d’une interview. Normal, l’auteure est journaliste de formation.

Le surréalisme et la fantaisie de cette pièce de théâtre ( ?) atteignent son comble dans le dialogue des personnages bizarres : lit, matelas, serrure… Et, hormis quelques didascalies actives et fonctionnelles, la pièce est dépourvue d’ameublement stylistique : pas de bouclage parfait ou à retardement, ni de stichomythie. Tout est à reconstruire et à repeindre dans cette pièce. Voilà !

Bedel Baouna

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